Maud était étendue sur les bords du Lac Chen, profitant d'une pause dans son voyage. Son cheval avait besoin de se reposer, et elle aussi. Elle avait fait un long voyage entre la Citadelle, où elle était allée voir Béa et Calista. Les deux Frontalières semblaient aller plutôt bien, et le temps passé avec elle avait rassénéré la Marchombre.

Le voyage avait été calme. Un tigre des prairies était passé à côté d'elle sans l'attaquer, et elle avait croisé un troupeau de siffleurs paisible, et elle avait repéré des traces d'ours élastique sans l'apercevoir pour autant. Son cheval avait cependant marché toute la journée, et il était épuisé. Il avait besoin de boire, aussi Maud l'avait-elle dirigé vers le Lac Chen, pour qu'il puisse se déshydrater à sa guise. Il avait à présent le museau dans l'eau et la Marchombre était allongée sur le sol, observant le ciel et les nuages qui le parcouraient. Elle se demandait ce que ça faisait, d'être un nuage. Ca devait être si agréable ...

Perdue dans ses pensées, elle entendit pourtant parfaitement le bruit de pas qui s'approchaient d'elle. Aussitôt en alerte, elle saisit ses poignards tout en conservant une attitude en apparence détendue. L'intru - ou les intrus - était-il Mercenaire ? Ou simple voyageur, comme elle, voulant se reposer ?

Nul ne saurait dire ce qu’il faudrait pour que la barde sa lasse de cet endroit. Le Lac Chen est probablement le lieu que la jeune femme a le plus arpenté durant sa jeunesse, avant qu’elle ne décide de parcourir Gwendalavir d’Est en Ouest et du Nord au Sud. Aux yeux de n’importe quel étranger à la région, ce lac ne serait qu’un autre lac parmi tant d’autres, beau et paisible. Mais pour Nymeia, il représente bien plus que cela. Il y a maintenant plus de quinze ans qu’elle tente de trouver les mots juste pour chanter l’éloge qui s’accorderait parfaitement à la grandeur du Lac.

Après des mois à tenter de se remettre du deuil provoqué par la disparition des jumeaux, Nymeia parvient enfin à trouver la force de concevoir un futur et de nouvelles compositions. Son monde et ses pensées sont toujours aussi sombres, mais elle envisage de nouveau d’écrire, inspirée par cette prophétie, ne parvenant pas à résister à ces mots et ces airs qui la démangent. Mais pour s’y remettre, elle doit y aller doucement. Reprendre la route, seule, n’est pas encore envisageable pour elle. Pourtant, le monde ne s’est pas arrêté et elle sait que les jumeaux ne seraient pas ravis de la voir baisser les bras. Elle qui était curieuse, pleine de vie, pour qui rien ni personne ne pouvait entraver sa créativité, elle se retrouve à devoir tout réapprendre, comme une enfant.

C’est sur le dos de sa fidèle monture qu’elle quitte la maison de Gisella pour se rendre au lac. Personne ne la retient, la voir reprendre la route serait presque un soulagement pour les Zoen. C’est la première fois que la jeune femme reprend la route en solitaire. Autrefois, les jumeaux étaient là pour la protéger, lui tenir compagnie, s’assurer qu’elle ne se perde pas, mais à présent, il n’y a plus qu’elle. Ce n’est pas faute d’avoir reçu la sollicitation de l’un de ses frères, mais elle n’a rien voulu savoir.

Au bout de la route, enfin, elle retrouve ce lac, inspire une grande bouffée d’air frais, et se permet un sourire. Sur le bord du lac, elle aperçoit une jeune femme, et l’envie irrépressible de sociabiliser de nouveau se fait ressentir. Elle descend de sa monture et s’approche de l’inconnue.

« Rien de tel que la vue du Lac Chen, n’est-ce pas ? »

Elle se tourne vers la jeune femme qui semble en alerte. Nymeia aurait probablement réagi de la même manière si elle s’était retrouvée à sa place, mais elle lui adresse un sourire qui n’est finalement pas si difficile à esquisser, petit geste qu’elle avait oublié depuis quelques mois.

« Je ne vous ai pas fait peur j’espère ? »

Ce visage, il lui est familier, mais mettre un nom dessus lui semble une tâche presque impossible. Elle fronce légèrement les sourcils en quête de l’identité possible de la jeune femme, mais rien ne lui vient.

En voyant la jeune femme s'avancer, Maud se détend légèrement. La brune s'approcha encore avec un joli sourire, et Maud acquiesça à sa phrase.

- En effet, le lac est toujours magnifique, et sourtout, frais. Et non, tu ne m'a pas fait peur, je suis toujours sur mes gardes, au cas où.

Maud sourit à son tour, en espérant que la brune ne s'offusquera pas d'être tutoyée. La Marchombre a toujours tutoyé tout le monde, excepté Barlow à qui elle voue un respect trop immense pour être tutoyé. A force d'observer la nouvelle arrivée, Maud réalisa qu'elle lui était familière. Où et comment elles auraient pu se rencontrer en revanche, elle l'ignorait, ce qui était étrange étant donné qu'elle avait une très bonne mémoire des visages. Maud pencha la tête sur le côté, puis décida d'y aller cash.

- Dis moi, on ne se serait pas déjà rencontrées ? J'ai l'impression de te connaître, mais je n'arrive pas à remettre un nom sur ton visage. Je suis Maud, au fait.

Ajouta-t-elle, en réalisant qu'elle ne s'était pas présentée. Elle tapota le sol à côté d'elle pour inviter la brune à s'assoir, avant de reprendre :

- A part admirer le lac Chen, tu viens faire quoi par ici, si ce n'est pas indiscret ? Tu es originaire de la ville ?

Ca pourrait être une première piste, Maud étant elle-même née à Al-Chen. Peut-être que la jeune femme avait été une compagne d'infortune de la Marchombre, mais qu'elle l'avait oubliée en partant avec Barlow. Après tout, ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas revu celleux avec qui elle "travaillait" enfant, pour le compte de la Mégère.

L’air au bord du lac est frais, une légère brise vient souffler dans les cheveux de la barde. Elle est légèrement soulagée lorsque l’inconnue lui dit qu’elle n’a pas eu peur. On ne peut pas dire que Nymeia soit une personne impressionnante, mais arriver de nulle part dans le dos d’une personne seule, ça peut parfois surprendre. Elle dit être toujours sur ses gardes, ce qui fait se questionner Nym sur les occupations de la jeune femme. Si la barde reste à l’affût de ce qui se passe autour d’elle, elle n’a jamais pris l’habitude d’être sur ses gardes constamment, elle était même plutôt insouciante car toujours entourée et protégée.

Comme si la brune lisait dans ses pensées, elle demande à Nymeia si elles ne se seraient pas déjà rencontrées auparavant. Sachant que l’impression fut la même pour la barde, il n’y a pas de doute, leurs chemins se sont déjà croisés.

« Je pense effectivement que nous nous sommes déjà vues, j’ai eu la même impression en te voyant. Maud ? Mmh… »

Nymeia croise les bras et se met à réfléchir, le visage est familier mais le prénom ne sonne aucune cloche dans son esprit. Maud… Non, il n’y a rien à faire, ce n’est pas l’indice qui lui permettra de remettre où elles se sont déjà vues. Elle soupire, vaincue par le tour que lui joue sa mémoire.

« Si nous nous sommes croisées, je ne pense pas que nous ayons échangé nos noms. Le mien devrait sûrement te dire quelque chose cependant, je suis Nymeia, barde renommée dans tout Gwendalavir. »

La fierté se lit sur son visage. Elle n’a jamais été forte pour rester humble lorsqu’il est question de dire qui elle est. Il faut dire que la plupart du temps, si l’on ne connaît pas son nom, on connaît au moins l’une de ses chansons.

La barde répond positivement à l’invitation pour s’asseoir aux côtés de Maud. Insouciante. Elle n’avait pas rencontré qui que ce soit hormis les membres de sa famille depuis des mois, à part quelques amis qui étaient venus prendre de ses nouvelles, quelques personnes inquiètes, mais sortir de cette carapace qu’elle s’était forgée lui faisait un bien fou, et il faut croire que le naturel reprend le dessus bien plus vite qu’elle ne l’espérait. De là à dire qu’elle est guérie, loin de là.

« Oh, oui, je suis originaire de la région d’Al-Chen, je suis souvent venue quand j’étais plus jeune, mais après j’ai parcouru le continent pour performer là où j’étais demandée ou bien là où j’étais sûre d’avoir du succès. Je suis simplement venue ici pour prendre l’air, m’éloigner un peu de la ville, me retrouver avec moi-même et l’inspiration. »

Elle ferme brièvement les yeux comme pour laisser l’air environnant lui insuffler cette inspiration légendaire. Puis, elle attrape sa lyre dans sa sacoche et la brandit devant la jeune femme comme un trophée.

« Si tu le souhaites, je peux te jouer un morceau, peut-être que tu le reconnaîtras. »

Elle accorde rapidement son instrument et réfléchis à quelle chanson elle pourrait interpréter spécialement pour Maud, puis réalise qu’elle a parlé d’elle sans réellement demander qui était cette femme.

« Je suis vraiment impolie, pardonne-moi. Qu’est-ce que tu fais dans le coin ? Tu es aussi originaire de la région ou tu ne fais que passer ? »

La brune vient confirmer l'étrange impression qu'avait eu Maud en la voyant. Elles se connaissaient, c'était évident, mais d'où ? Et comment ? Nymeia se présenta, et visiblement elle estimait que son nom était connu, mais ça ne disait rien à Maud. Elle hocha la tête, pour faire comme si elle l'avait déjà entendu quelque part, dans l'espoir de ne pas décevoir cette jeune barde pleine d'espoir, mais en réalité, elle ne la connaissait pas du tout.

Nymeia s'installa et commença à parler. Maud fut presque impressionnée, elle-même était une pipelette de premier ordre et pourtant, elle n'avait pas réussi à en placer une. Mais la Marchombre avait écouté attentivement, en quête d'indices qui pourraient lui dire où elle l'a déjà vue.

Puis Nymeia s'excusa et ce fut au tour de Maud de parler :

- Oh, ne t'en fais pas, j'aime bien écouter les gens parler. Je suis née à Al-Chen oui, mais en général j'évite d'y revenir. Aujourd'hui, je ne fais que passer, je me rends à Al-Jeit.

Pour un Conseil, ajouta-t-elle dans sa tête. Elle ne savait pas si la barde avait compris ce qu'elle était, mais elle n'avait pas l'intention de le confirmer.

- J'ai profité d'être dans le coin pour admirer la vue. Et mon cheval avait soif. Rajouta-t-elle en désignant son cheval, qui avait encore les naseaux dans l'eau.

Un sourire amusé étira les lèvres de la Marchombre. Puis elle se tourna à nouveau vers la barde, et lança :

- Je veux bien écouter ta chanson, d'ailleurs. Peut-être que ça me dira quelque chose !

Elle s'assit en tailleurs face à la brune, et se prépara à écouter attentivement.

Nymeia ne se rend pas toujours compte à quel point elle peut être bavarde. Elle parle et parle encore sans s’avoir se mettre de limite lorsqu’on lui en donne l’occasion, mais le fait de s’être renfermée sur elle-même des mois durant, ce besoin de compenser se fait ressentir. D’après la brune, ça n’est pas dérangeant et tant mieux. Il n’y a rien de pire aux yeux de la barde que de devoir fermer son clapet parce qu’elle parle ou chante trop.

Elle écarquille les yeux lorsque la jeune femme jusqu’alors inconnue prétend être née à Al-Chen. Elle ne saurait estimer l’âge de Maud, peut-être un peu plus âgée que Nymeia mais pas de beaucoup. C’est peut-être que de là que vient cette impression de déjà vu, sans être réellement d’anciennes connaissances, croiser ce visage dans le passé est une possibilité. Nym est légèrement confuse lorsque son interlocutrice dit vouloir éviter de revenir dans le coin généralement, avant de préciser qu’elle ne fait que passer pour se rendre à Al-Jeit. Elle penche légèrement la tête sur le côté avant d’interroger la brune.

« Pourquoi vouloir éviter de revenir ? Ma question est sûrement indiscrète, j’ai juste du mal à comprendre étant née ici. J’aime Al-Chen, et même si parcourir le monde est quelque chose que j’aime plus que tout, revenir chez moi, revoir ma famille, ce lac et tous les habitants que j’ai connu plus jeune, tout cela me procure un certain bonheur. »

Évidemment que tout le monde n’a pas la même vie, et sa question est peut-être déplacée, mais Nymeia aime comprendre, aime avoir les points de vue des gens qu’elle rencontre, c’est ce qui fait la richesse du monde et de son art.

« Je connais bien Al-Jeit, c’est également une ville où je suis beaucoup allée. J’y performe très souvent, c’est là que j’ai le plus de succès ! Je performe généralement seule, mais j’ai déjà collaboré avec le Cabaret des Reflets de Lune, tu connais ? »

Très vite, le sourire sur les lèvres de Nymeia s’élargit lorsque Maud dit bien vouloir écouter sa chanson. Elle ne se fait pas prier et encore moins attendre. Elle termine rapidement d’accorder sa lyre et se remet debout.

« C’est l'une de mes premières chansons, une que j’ai écrite lorsque je vivais encore à Al-Chen. »

Elle entame la mélodie en pinçant délicatement les cordes de la lyre, mélodie joviale, idéalement composée pour les banquets et les événements heureux. Les notes s’enchaînent sans encombre jusqu’à ce que vienne le moment des paroles.

« … »

Aucun mot ne sort de la bouche pourtant ouverte de Nymeia. Les paroles, elle les connaît et ne les oublierait jamais. C’est l’image des jumeaux qui revient dans son esprit qui l’empêche de prononcer le moindre son. Cette chanson, elle l’avait chantée pour la première fois devant eux alors qu’ils étaient encore bien jeunes et n’avaient pas encore décidé de l’accompagner dans ses périples. A l’époque, elle ne voyageait pas comme maintenant. Les larmes se mettent à ruisseler le long des joues de Nymeia, et brusquement elle s’arrête de jouer et tourne le dos à la native d’Al-Chen.

« Je… désolée… Je ne peux pas. »

Alors comme ça, la blessure n’est pas réellement guérie. Il y a un naturel qui sait revenir, mais pour d’autres choses, les plaies sont encore vivement ouvertes. Ce pincement au cœur, ce sentiment de souffle coupé, et ces larmes, le deuil est toujours là.

Quand Maud avoue qu'elle évite de revenir dans la ville qui l'a vue naître, Nymeia lui demande pourquoi. La Marchombre s'attendait à cette question, certes, mais replonger dans ses souvenirs ne lui faisait pas plaisir pour autant. Mais elle se força à répondre, peut-être que la jeune femme connaissait des gens de son ancien quartier ? Et peut-être même lui, qui sait ?

- Je ... Le quartier où j'ai grandi est le plus pauvre d''Al-Chen. Les adultes travaillaient beaucoup pour pas grand-chose et les enfants étaient exploités par une femme, riche à milions, qu'on appelait la Mégère. Quand je suis partie, je me suis jurée de ne jamais y retourner. Et puis ... J'ai abandonné des gens, là-bas, qui comptaient sur moi. Des gens que je ne suis pas sûre de vouloir revoir. D'être capable de les revoir.

Maud sourit à la jeune femme dans une vaine tentative de dédramatiser ses propos, puis lui demande une chanson. Mais Nyméia semble avoir du mal, les paroles ne viennent pas, puis elle fond en larmes. Elle tourne le dos à la Marchombre qui pose une main bienveillante, mais légère, sur son épaule.

- Ne t'en fais pas.

Elle devine que la douleur est vive, que l'évènement est sans doute récent. Sa voix devenue murmure, la Marchombre ajoute :

- Tu es en sécurité ici, tu sais. Jamais je ne jugerais quelqu'un parce qu'il pleure. Je jugerai s'il ne pleure pas. Parfois laisser couler les larmes a une vertu apaisante, comme l'eau d'une rivière qui s'écoule inexorablement vers la mer. C'est l'ordre des choses.

Puis Maud se tait, mais laisse sa main sur l'épaule de la jeune barde. Pour qu'elle sache qu'elle n'est pas seule. Aujourd'hui, Maud sera son amie, là pour essuyer ses larmes et faire réapparaître un sourire éphémère sur ses lèvres. Parce que parfois, les mots d'une inconnue ont plus d'impact que ceux de nos proches.

Nymeia avait entendu parler de la Mégère, il y a bien longtemps de cela. Elle ne savait pas cependant qui était cette femme, pour elle, ce n’était qu’une rumeur, une légende urbaine et elle s’était même persuadée qu’après toutes ces années, elle n’était plus dans les environs. Pourtant, Maud était la preuve vivante que la Mégère existait bel et bien, et qu’elle était une personne peut recommandable, à l’instar de ce que les rumeurs laissaient penser. Nym se sentit mal pour la jeune femme, compatissante bien qu’elle ne puisse imaginer ce qu’elle a vécu.

« Je suis désolée que tu aies dû traverser tout ça. J’ai la chance de ne jamais avoir rencontré la Mégère personnellement, mais les rumeurs parlent d’elles-mêmes. »

Puis, la barde se lance dans une chanson de sa propre facture. Une chanson qu’elle n’a pas eu l’occasion de chanter depuis bien longtemps, une chanson qui a un sens tout particulier dans la vie de Nymeia. Elle pensait que cette occasion était la bonne, revenir à Al-Chen, au bord du lac, rencontrer cette jeune femme, et pourtant, le traumatisme de la perte de ces deux êtres chers prend le dessus bien vite, rendant la barde incapable de se produire. Un silence s’échappe des lèvres de la brune, un silence qui en dit long.

Elle se confond en excuse, presque honteuse. C’est bien là le comble pour une barde aussi fière qu’elle de ne pas parvenir à faire la seule chose pour laquelle elle est douée. Cela ne semble pas être sujet de moquerie aux yeux de la personne tout fraîchement rencontrée. Au contraire, elle semble même encourager Nymeia à laisser couler ses larmes. La main sur l’épaule se veut rassurante. Les larmes coulent alors de plus belle et elle s’effondre alors sans honte, les genoux venant heurter le sol dur qui se trouve juste sous ses pieds.

« Vais-je un jour être capable d’oublier, de passer outre et de finalement être capable de chanter de nouveau, d’écrire également de nouveau ? Quelle piètre barde je fais si je ne suis capable de gérer ces émotions pour en tirer profit et en faire quelque chose de joli à entendre ? Les larmes sont peut-être l’ordre des choses, mais elles produisent une bien piètre mélodie. »

Elle a honte. Pas de ce qu’elle ressent mais d’être incapable de gérer cette crise depuis tous ces mois. Peut-être aurait-elle connu d’autres malheurs dans sa vie, aujourd’hui elle serait capable de se remettre bien plus vite. Le deuil n’est pas encore fait et elle se demande chaque jour si elle sera un jour capable de le faire.

« Je ne devrais pas t’embêter avec tout cela. Tu n’es pas venue au bord du lac pour écouter une pauvre barde se lamenter sur son sort. Que vas-tu faire à Al-Jeit ? »

Al-Jeit lui manque. Le monde, la musique, les arts, ses amis, le cabaret, toutes ces petites choses lui manquent tellement. Elle se demande même si ce ne serait pas la solution à tous ses maux. Rester ici, à Al-Chen, c’est probablement ce qui l’empêche d’aller de l’avant.