Maud avait été engagée comme Eclaireuse pour une caravane d'Itinérants. La caravane avait trouvé son dernier membre manquant en la personne de Dawn, une jeune femme blonde à l'apparence douce que Maud n'avait pas encore eu le temps d'approcher. Dû à son poste, la Marchombre devait souvent être devant la caravane, loin des guerriers qui la protégeaient. Elle aimait ce poste, Maud, qui lui permettait d'avoir la solitude qu'elle appréciait tant, et en même temps, ça lui pesait de ne pas avoir de contacts humains. Alors ce soir là, quand elle revint à la caravane qui s'était arrêtée pour la nuit, après avoir fait le tour de l'endroit en repérage, elle alla s'asseoir à côté de Dawn pour le repas.

Le feu de camps l'éclairait de manière presque surnaturelle, la blonde, et Maud l'aborda avec la simplicité qui la caractérisait.

- Salut ! Je suis Maud, et toi ?

Oh, elle connaissait déjà son nom, puisqu'elle laissait traîner ses oreilles un peu partout, mais elle avait estimé qu'il était moins étrange de feindre de ne pas le connaître. La Marchombre espérait cependant que Dawn ne serait pas vexée par son manque de manières, Maud avait tendance à tutoyer tout le monde.

Tout en mangeant, Maud offrit un sourire à celle qui, elle n'en doutait pas, deviendrait une nouvelle amie.

La protection des caravanes faisaient partie intégrante de leur travail de frontalier et, en souvenir de sa première mission pour la Citadelle, Dawn avait accepté avec un plaisir non feint de s'y couler une nouvelle fois. Elle savait à quel point ces missions en apparence simple et basique pouvaient dissimuler de sombres desseins, des attaques diverses et variées et des rencontres hors du commun. De l'aventure à n'en plus savoir quoi faire, dissimulée sous un masque délicat de simplicité. Elle avait signé et l'aube l'avait trouvée prête sur l'esplanade des départs, le baluchon balancé sur le dos de son cheval, l'arc accroché à son encolure. D'autres frontaliers, certains qu'elle connaissait de vue, d'autres qu'elle découvrait s'étaient joints à leur communauté et c'est le même regard respect qu'elle déposa sur eux, en écho à ceux qu'ils lui renvoyaient eux-mêmes. Ils étaient des inconnus quelques heures auparavant et pourtant, ils seraient frères et sœurs pour les quelques mois à venir. Les autres membres de la caravane l'ignoraient, trop occupés à charger les différents chariots et elle put poser le regard sur chacun d'entre eux à loisir. Marchands, aide cuisinière tout juste sortie de l'enfance, garçon d'écurie chargé par le seigneur de s'occuper des chevaux, et finalement, une jeune femme aux cheveux déliés et au sourire éblouissant. Ses gestes ne mentaient pas, pas plus que sa démarche et Dawn sourit en décroisant ses bras. Ainsi, il y aurait une marchombre dans leur caravane. Alors que les chariots s'élancèrent, Dawn et ses camarades frontaliers s'organisèrent pour l'entourer totalement, chacun se déployant à une centaine de mètres de l'autre, ayant toujours à coeur de voir celui le précédent, et s'arrangeant pour être visible de loin par celui le suivant. C'est ainsi que les heures s'égrenèrent, faciles, l'esprit bouillonnant d'excitation comme à chaque départ de ces caravanes. Dawn laissa vagabonder son esprit, observant avec sérieux tous ceux qui l'entouraient, tâchant de retenir les prénoms, de sourire aux quelques enfants que comptait la caravane, avenante, douce mais toute à sa tâche. Le ciel s'obscurcit et, alors que les caravaniers allumaient les premiers feux, les frontaliers s'organisèrent pour se camper aux extrémités du camp dressé pour l'occasion. Dawn attribua les premiers tours de garde, et, gardant le sien pour les heures sombres de la nuit, s'installa près du feu pour commencer à manger, gardant un œil concentré sur ceux qui s'étaient assis près d'elle.  Malgré son jeune âge, elle avait pris naturellement la tête de leur troupe de frontaliers, uniquement parce que son avis donné sur la formation à prendre ou leur fonctionnement avait été le plus utile et elle savait que les frontaliers aimaient l'ordre et l'efficacité plus que tout. Une voix l'éjecta de ses pensées et la jeune femme qu'elle avait remarqué plus tôt se glissa près d'elle. "Dawn, enchantée. Frontalière. Et toi?" Elle lui adressa un sourire doux, celui qui indiquait qu'elle pouvait répondre, mais qu'au fond, sa réponse était déjà connue. Elle savait les marchombres très secrets, mais elle n'en avait jamais encore rencontré et sa curiosité devint dévorante.

Maud avait passé la majorité de la journée seule, sur son cheval, loin de la caravane. Le travail d'éclaireuse était l'un de ceux qu'elle préférait. Elle aimait se ressourcer la journée, prendre des forces pour aller s'intégrer le soir. La Marchombre avait activé son état de vigilance maximum, elle ne se permettrait pas qu'il arrive quoi que ce soit à la caravane par sa faute. Elle effectuait de nombreux allers-retours pour aller tenir au courant le frontalier de tête, mais ne s'attardait pas avec ellui. Elle se contentait de lui transmettre les infos importantes puis repartait.

Alors le premier soir, elle alla se poser aux côtés de cette jeune frontalière qui lui inspirait confiance. Dawn lui répondit avec un sourire avant et lui demanda ce qu'elle était.

- Je suis l'éclaireuse de la caravane.

Maud savait pertinemment que ce n'était pas la réponse qu'attendait la blonde, comme elle savait qu'elle se doutait probablement de sa véritable appartenance. Mais elle préférait la taire pour l'instant, elle ne souhaitait pas que toute la caravane soit au courant, et même si son instinct lui disait qu'elle pouvait faire confiance à Dawn, sa méfiance naturelle l'en empêchait. Peut-être plus tard.

- C'est dur, d'être Frontalière ? Je me suis toujours demandée quel était votre routine, votre entraînement.

Maud était de nature curieuse, elle espérait juste que Dawn ne serait pas vexée ou soûlée par ses questions. Maud reprit un bouchée du repas, et sourit à nouveau.

- C'est ta première caravane ? Je ne t'ai jamais vue, et pourtant, je pars beaucoup en itinérance.

Maud était une habituée des caravanes, au point que le gérant à Al-Far ne prenait plus la peine de lui demander son identité. Elle était connue comme le loup blanc sur l'Esplanade, en bien, heureusement.